vendredi 11 février 2011

I.Vingt Mille lieues sous les mers: pression exercée sur un corps immergé


Ecrit en 1869 Vingt Mille Lieues sous les mers, l’un des romans les plus connus de Jules Verne est l’histoire des trois hommes, Pierre Aronnax, Conseil et Ned Land qui se retrouvent emprisonnés dans le Nautilus, navire sous-marin dont le capitaine qui se fait appelé Nemo est un individu mystérieux qui hait l’humanité et fuit la compagnie. 


A. Enoncé de l'extrait et hypothèses

Dans les premiers chapitres du récit, le trio poursuit un monstre marin à bord d’un navire de chasse, L’Abraham Lincoln. C’est alors que Pierre Aronnax et Conseil rencontrent le harponneur Ned Land et souhaitent connaitre son avis sur la bête traquée. Dans ce passage, le professeur français explique au chasseur pourquoi selon lui l’animal est gigantesque en démontrant que la pression augmente avec la profondeur.

 
« Remarquez, mon digne Canadien, repris-je, que si un tel animal existe, s'il habite les profondeurs de l'Océan, s'il fréquente les couches liquides situées à quelques milles au-dessous de la surface des eaux, il possède nécessairement un organisme dont la solidité défie toute comparaison. 
- Et pourquoi cet organisme si puissant ? demanda Ned.

- Parce qu'il faut une force incalculable pour se maintenir dans les couches profondes et résister à leur pression
 
Illustration de Ned Land par Edouart Riou
(1869)

[…]Écoutez-moi. Admettons que la pression d'une atmosphère soit représentée par la pression d'une colonne d'eau haute de trente-deux pieds. En réalité, la colonne d'eau serait d'une moindre hauteur, puisqu'il s'agit de l'eau de mer dont la densité est supérieure à celle de l'eau douce. Eh bien, quand vous plongez, Ned, autant de fois trente-deux pieds d'eau au-dessus de vous, autant de fois votre corps supporte une pression égale à celle de l'atmosphère, c'est-à-dire de kilogrammes par chaque centimètre carré de sa surface. Il suit de là qu'à trois cent vingt pieds cette pression est de dix atmosphères, de cent atmosphères à trois mille deux cents pieds, et de mille atmosphères à trente-deux mille pieds, soit deux lieues et demie environ. Ce qui équivaut à dire que si vous pouviez atteindre cette profondeur dans l'Océan, chaque centimètre carré de la surface de votre corps subirait une pression de mille kilogrammes. Or, mon brave Ned, savez-vous ce que vous avez de centimètres carrés en surface ?
-- Je ne m'en doute pas, monsieur Aronnax.

-- Environ dix-sept mille.

-- Tant que cela ?
-- Et comme en réalité la pression atmosphérique est un peu supérieure au poids d'un kilogramme par centimètre carré, vos dix-sept mille centimètres carrés supportent en ce moment une pression de dix-sept mille cinq cent soixante-huit kilogrammes.
-- Sans que je m'en aperçoive ?

-- Sans que vous vous en aperceviez. Et si vous n'êtes pas écrasé par une telle pression, c'est que l'air pénètre à l'intérieur de votre corps avec une pression égale. De là un équilibre parfait entre la poussée intérieure et la poussée extérieure, qui se neutralisent, ce qui vous permet de les supporter sans peine. Mais dans l'eau, c'est autre chose.
-- Oui, je comprends, répondit Ned, devenu plus attentif, parce que l'eau m'entoure et ne me pénètre pas.

-- Précisément, Ned. Ainsi donc, à trente-deux pieds au-dessous de la surface de la mer, vous subiriez une pression de dix-sept mille cinq cent soixante-huit kilogrammes ; à trois cent vingt pieds, dix fois cette pression, soit cent soixante-quinze mille six cent quatre-vingt kilogrammes ; à trois mille deux cents pieds, cent fois cette pression, soit dix-sept cent cinquante-six mille huit cent kilogrammes ; à trente-deux mille pieds, enfin, mille fois cette pression, soit dix-sept millions cinq cent soixante-huit mille kilogrammes ; c'est-à-dire que vous seriez aplati comme si l'on vous retirait des plateaux d'une machine hydraulique ! »


Kirk Douglas dans la peau du harponneur canadien en 1954


B. Validation des hypothèses
1) Vocabulaire


Il est important de définir les différentes notions abordées dans les points suivants afin de mieux comprendre ce dont il est question.  


Force : En physique, la force est une actions mécanique capable de créer une accélération.


Pression : La pression est une force appliquée sur une unité de surface. Notée p c’est le quotient d’une force F sur l’aire d’une surface S. Elle se traduit donc par la relation :



P s’exprime en Pascal (Pa)
F s’exprime en Newton (N)
S s’exprime en mètre carré (m²)

Pression atmosphérique : La pression atmosphérique est la pression exercée par l’air en un lieu donné.

Poids : Le poids est la force d’origine gravitationnelle exercée par la Terre sur un corps ayant une masse.

2) Vérification des calculs

Le professeur Aronnax imagine que la pression atmosphérique soit une colonne d’eau de trente-deux pieds et à partir de cette représentation il parvient à trouver quelle pression est exercée par cette dernière sur le harponneur Ned Land à la surface de l’eau puis sous l’eau. Nous allons étudier ses résultats.

a. A la surface de l'eau


Représentation de la colonne

 


En connaissant la masse ainsi que le poids de la colonne d’eau nous pourrons en déduire la valeur de la pression qu’elle exerce sur une surface de 1cm².

Volume de la colonne d’eau
Pour pouvoir calculer la masseM(c) de la colonne d’eau nous devons d’abord connaitre son volumeVeau qui est égal au produit de sa hauteurh par sa surfaceS. C’est-à-dire :
Veau= h*S

Veau est en mètre cube (m3)
S = surface de la colonne = 1.0*10-4
h = hauteur de la colonne = 10 m


Application numérique : Veau = h*S = 10*1,0*10-4 = 1.0*10-3 m3


Masse de la colonne d’eau
La masse de la colonne est le produit de la masse volumique r par le volume du liquide Veau. C'est-à-dire :
M(c)= r*Veau

M(c)est en Kilogramme (Kg)
r = 1000 Kg/m3
Veau= 1.0*10-3 m3

Application numérique : M(c)= r*Veau= 1000*1.0*10-3 = 1 Kg


Poids de la colonne d’eau
Le poids de la colonne d’eau, ou encore la force F(c) qu’elle exerce sur une surface donnée, est le résultat de sa masse M(c) par la force gravitationnelle g qui est une constante. C'est-à-dire :

F(c) = M(c)*g

F(c)est en Newton (N)
M(c) = 1Kg
g=9,81 N/Kg


Application numérique : F(c) = M(c)*g =1*9,81 =9,81 N


Pression exercée par la colonne

La pression qu’exerce la colonne d’eau sur un centimètre carré est le rapport de son poids F(c) sur sa surface S. C'est-à-dire :

Pression= F(c) / S

Pressionest la pression qu’exerce la colonne en Pascal (Pa)
F(c)= 9,81 N
S = 1.0*10-4

Application numérique : Pression= F(c)/S = 9,81 / 1.0*10-4= 98 100 Pa



Maintenant que l’on sait que la pression exercée sur un centimètre carré est de 98 100 Pa, nous allons calculer la valeur de la pression exercée sur Ned Land. Pour cela, nous devons auparavant connaitre sa surface.

Surface de Ned Land

Dans l’extrait, il est dit que la surface de Ned Land est d’environ 17 000 cm². Afin d’augmenter la précision de nos calculs, nous allons utiliser une surface S’ hypothétique proche de celle énoncée.
Puisque l’homme est vu comme étant un « géant » on va considérer qu’il mesure 190cm et est large de 90cm.
Sachant que la surface S’ est égale au produit de la hauteur h’ par la largeur L, nous nous retrouvons avec la relation suivante :
S’ = h’*L
S’est en cm²
h’=190 cm
L = 90 cm
Application numérique : S’ = h’*L= 190*90 = 1,71 m²



Pression exercée par la colonne sur Ned Land
La pression FNed exercée par la colonne sur Ned Land est égale au produit de la pression Pression par la surface de Ned Land S’.
FNed= Pression*S’
FNedest en Newton (N)
Pression = 98 100 Pa
S’= 17 100 cm²
Application numérique : FNed= 98 100*1,71= 167 751 N



Masse supportée par Ned Land
La masse m supportée par Ned Land est égale au quotient de la pression FNed exercée sur Ned Land par la force gravitationnelle g.
m = FNed/g
mest en Kilogramme (Kg)
FNed=167 751 N
g=9,81 N/Kg
Application numérique : m = FNed/g= 167 751*9,81 = 17 100 Kg



Calcul de la marge d’erreur
Le résultat que nous avons trouvé étant différent de celui de l’extrait, il est nécessaire de calculer la marge d’erreur commise afin de comparer les deux considérées.
m = masse trouvée par calcul = 17 100 Kg
m(e)= masse supporté par Ned Land d’après l’extrait = 17 568 Kg
Marge R= marge d’erreur en  %

Marge R = ½(m – m(e))/2 ½* 100

Application numérique : Marge R = ½(m – m(e))/2 ½* 100
= ½(17 100-17 568)/2½*100
= 2,7%
Puisque la marge d’erreur Marge R est inférieure à 5% on peut considérer que nos calculs sont corrects.


b. Sous l'eau

On a vu que lorsque Ned Land est à la surface de l'eau, il supporte le poids d'une colonne d'eau. Une fois plongé, le personnage supporte deux fois le poids d'une colonne d'eau, ce qui explique l'augmentation de la pression qui s'exerce sur lui. On le voit avec le schèma ci dessous:



Si on s'intéresse aux forces qui s'exerçent sur Ned Land, on se rend compte qu'à la surface de l'eau, deux forces F® et F’®  s'exerçent sur le crâne de Ned Land, modélisé ici par une sphère.

Les deux forces se compensent, ce qui explique que le personnage ne sent pas la pression qui s'exerçe sur lui. Cependant, sous l'eau la situation est différente puisqu'une troisième force F®*s'ajoute aux deux autres. Cette dernière se fait sentir et non pas les deux autres. Ce qui explique que l'augmentation de la pression.

Nous allons à présent refaire les mêmes calculs que précedemment mais en considérant que Ned Land se trouve immergé. La colonne qui reprèsente la pression exercée sur le personnage contient donc de l'eau de mer et non plus de l'eau douce.

Remarque: la masse volumique de l'eau de mer est de 1,025 g/ml, elle est 2,5% plus grande que celle de l'eau douce qui est de 1 g/ml.


Masse de l’eau de mer

La masse mmerde l’eau de mer est égale au produit de la masse volumique rmerpar le volume Veau. Ainsi :
mmer=rmer *Veau

mmerest en Kilogramme (Kg)
rmer=1025 Kg/m3
Veau = 1.0*10-3 m3

Application numérique : mmer= rmer * Veau=1025*1.0*10-3= 1.025 Kg



Poids de la colonne d’eau de mer
Le poids de la colonne d’eau de mer Pmerest égal au produit de la masse de la colonne d’eau de mer mmerpar la force gravitationnelle g.

Pmer=mmer* g
Pmerest en Newton (N)
mmer=1.025 Kg
g=9, 81 N/Kg
Application numérique : Pmer = mmer* g=1.025*9,81= 10,0552 N




Pression exercée par la colonne d’eau de mer sur Ned Land
La pression Pressionmer exercée par la colonne d’eau de mer sur Ned Land est égale au quotient du poids de la colonne Pmersur la largeur S de la colonne.

Pressionmer= Pmer/ S

Pressionmerest en Pascal (Pa)
Pmer=10,0552 N
S=1.0*10-4
Application numérique : Pressionmer=Pmer/ S = 10,0552/1.0*10-4 = 100 552 N


Calcul de la force exercée par la colonne sur Ned Land
La force Fmer exercée par la colonne sur Ned Land est égale au produit de la pression Pressionmer par la surface de Ned Land S’.

Fmer= Pressionmer* S’
Fmer est en Newton (N)
Pressionmer= 10,0552 N
S’= 17 100 cm²
Application numérique : Fmer= Pressionmer* S’= 100 552*1,7 1 = 171 943 N



Calcul de la masse supporté par Ned Land
La masse de la colonne d’eau de mer m'mersupporté par Ned Land est égale au quotient de la force Fmersur la force gravitationnelle g.
m'mer= Fmer/ g
m'merest en Kilogramme (Kg)
Fmer=171 943 N
g=9,81 N/Kg
Application numérique : m'mer= Fmer/ g= 171 943/9,81 = 17 527 Kg


3) Expérience
Nous avons réalisé une petite expérience afin de vérifier si la profondeur influence l’intensité de la pression.
Hypothèse : la pression augmente avec la profondeur.
Matériel :
  • Une petite bouteille en plastique vide
  •  De la grenadine (ou n’importe quel liquide coloré)
  • Un tire bouchon
  • Une règle
Protocole : A l’aide du tire bouchon percer trois trous équidistants dans la bouteille puis la remplir de grenadine.

Bouteille non remplie.

Bouteille en train d'être remplie.



Observation : On remarque que les jets sortants des trous n’ont pas tous la même intensité. En effet, le jet sortant du premier trou (le plus haut placé) est faible tandis que celui sortant du trou le plus bas est fort.



Interprétation: Plus le jet est bas plus son intensité augmente donc on peut dire que la pression augmente avec la profondeur.


C. Conclusion

A la vue des résultats de nos calculs ainsi que de l'expérience, nous pouvons affirmer que Jules Verne avait raison en affirmant que la pression augmente avec la profondeur. Cependant, il commet une erreur de vocabulaire en parlant d'atmosphère et non de pression athmosphérique.



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